Hier soir, je lui ai fait mes adieux. Nous savions, tous les deux, que c’était la dernière fois que nous nous verrions. J’y suis allée avec Mammouth et la tribu. Il a eu un bon mot pour chacun, et a enfin eu droit à son gros câlin de merveilleuse merveille.
Je suis ensuite restée seule avec lui quelques minutes. Nous avons pleuré, nous avons ri. Je l’ai remercié, du fonds du coeur, de tout ce qu’il a fait pour ma mère, pour mon frère, pour ma famille et pour moi. Il a toujours considéré merveille comme sa petite-fille, même si les liens du sang n’y sont pas. Le reste de notre discussion ne regarde que nous, mais j’ai vu, dans son regard intense, une grande sérénité. Pas encore de la résignation, mais une grande sérénité.
Avant de partir, il a tenu à se lever. J’ai serré dans mes bras son corps maintenant si frêle, en retenant mes sanglots. C’est à la fois l’horreur et la beauté de mourir de cette saloperie: l’horreur de voir la déchéance d’un humain qui, il n’y a pas si longtemps, était grand et fort comme un chêne. La beauté d’avoir le temps de se dire qu’on s’aime, et de se faire des adieux tristes certes, mais d’une réelle intensité. Un moment vrai. Pas de frime, pas de faux-semblants, pas de fausse pudeur.
Par deux fois, avec mon père et avec cet homme qui a aussi tellement aimé ma mère, j’ai eu le privilège de pouvoir dire adieu. Et j’ai une pensée, aujourd’hui, pour la famille de la mairesse Boucher. Quand la mort frappe aussi subitement, on doit rester avec un sentiment d’inachevé terrible.
Au revoir Oyé. Et bon voyage! Une fois dans l’avion, fais la bise aux miens. Et amusez-vous! Ici, une fois qu’on aura pleuré, c’est en riant que je me souviendrai de toi et de ton humour, et ce sont les souvenirs heureux que je raconterai à merveille. Je te l’ai promis, et je tiens toujours mes promesses…
Marie-José… c’est comme si j’absorbais tout tes mots, une vraie éponge… je mesure la difficulté de cet au revoir pour l’avoir vécu moi aussi, il y a 16 ans, avec mon père… dans une chambre d’hopital sordide, où l’hémorragie le vidait de toute son humanité, le rendant méconnaissable… Moi qui l’avait connu fort et robuste, du temps où il vivait avec nous… mes parents ont divorcé quand j’avais neuf ans… J
Je suis désolée, j’ai fait une mauvaise manip… (je ne suis pas chez moi, c’est pas mon ordi, et je voulais prendre de tes nouvelles)… de plus, je crois que j’ai un peu trop d’émotion en moi…
Je suis assez mal car j’ai fait mes adieux dans un contexte similaire au tien… et c’est la chose la plus difficile que j’ai eu à vivre… Je n’arrêtais pas de me dire « comment fait-il pour être si serein, pour accepter alors qu’il n’a que 47 ans?… Je pensais qu’à quelques jours de la mort, on était en révolte total, en colère… Il était si paisible, le fait de nous avoir autour de lui était la seule chose qui comptait… et on ne parlait que des bons moments… avec une voix enjouée, mêlée aus larmes silencieuses…
Ma maman a rencontré mon deuxième « papa » il y a bien longtemps… il m’a d’ailleurs élevée plus que le premier et il a vu naître mes enfants… mon père biologique ne les a pas connus… Mon papa a 78 ans, et même si il va bien, j’ai peur de vivre une autre maladie, un autre au revoir… C’est le « papy » de mes filles, l’homme qui a rendu ma maman heureuse après des années de violence conjugale excessive…
Je comprends ta douleur… Il est difficile de dire au revoir, par deux fois…
Je suis là si tu as besoin de parler… Je vous embrasse tous…
Véro
et pardon d’avoir scindé ce message en deux, je suis désolée…
@Véro: tu vois, j’ai beaucoup hésité avant de publier ce papier. Je sais que je fais revivre plein d’émotions à des gens, et ce n’est pas pour attrister qui que ce soit. J’ai besoin d’écrire, mais je voulais surtout témoigner du fait que je me considère privilégiée d’avoir vécu ces moments tristes, mais si vrais. On se permet tellement peu d’être soi-même. Et merci de tes bons mots, j’y puise beaucoup de réconfort.
Marie-José…
Je viens d’apprendre que mon père a le cancer du foie. Inopérable.
Tu as vécu un magnifique moment avec ton Oyé. Je te serre fort dans mes bras.
Copine nordique
Ho! Zamie du nord. Je t’envoies plein d’ondes et une partie de mon courage. Je te sais forte, et je te souhaite de tout coeur des moments tout aussi magnifiques avec ton père. Je suis là si tu as besoin. N’hésites pas!
Mes oncles André et Denis (samedi dernier) sont décédés de cette affreuse maladie à une année d’intervalle… je trouve ça horrible mais on ne peut qu’attendre enfin qu’ils soient soulagés…
{{Calins, marie-josé}}
p.s. amie du nord, je pense à toi (coeur)
Une pensée provenant de l’autre rive où ton message ravive aussi des souvenirs (mais ce n’est pas une mauvaise chose).
Bises
Comment veux-tu qu’on te console quand c’est toi qui nous fait le coeur gros comme ça…J’espère qu’il te laissera du bon et du beau longtemps longtemps…xxx
Quel beau texte. Très touchant.
Je crois aussi que c’est un privilège de pouvoir faire ses adieux et d’avoir le courage de le faire…
Votre deuil sera probablement plus facile à traverser.
wow…c’est la première fois que je te lis et je pleure tellement devant mon écran. C’est tellement beau comment tu réussis à raconter un évenement aussi déchirants. Bon courage à vous tous, mes meilleures pensées vous accompagne.