Petit matin sans horizon
Petit café, fumée d’usine
Je r’gardes le derrière des maisons
Les femmes sont à leur cuisine
Y’a des oiseaux qui s’font la cour
Sur les fils du Bell Téléphone
Et dans l’oeil crevé de ma cour
Un 747 qui résonne
J’ai toujours aimé Sylvain Lelièvre qui n’a pas eu droit, à mon humble avis, à toute la reconnaissance à laquelle il avait droit. J’aime ses textes, les univers qu’il dépeint. Marie-Hélène, c’était ma chum adoe; Old Orchard, les vacances famiiales; et les choses inutiles, une philosophie de vie.
Il est tôt, très tôt. Le soleil essaie de se faire une place entre les nuages, et le jardin s’éveille doucement. La chienne idiote est revenue se coucher à mes pieds, et à part le glouglou discret de la cafetière, aucun bruit dans la maisonnée endormie. Un petit matin comme je les aime. Du temps à moi, une pause au milieu de la vie folle de mamanconjointeamiecollèguecitoyennej’en-ai-tu-oublié?
Hier, 08 du 08 2008, tous les yeux étaient tournés vers la Chine. Les miens étaient tournés vers Québec et ont envoyé des ondes à mon amie Johanne, dont c’était l’anniversaire de naissance. On se voit bientôt, pendant mes vacances, et j’ai très hâte. Johanne fait partie de ces amitiés rares et précieuses qui ont survécu au temps, à mes multiples déménagements et à mes changements de carrière. Et même si on se voit moins souvent, si on s’appelle moins souvent, on reprend toujours le fil. C’est comme ça depuis 25 ans, et ce sera encore comme ça dans 25 ans.
Et puis aujourd’hui, je vais revivre ce samedi d’il y a 6 ans. Enceinte jusqu’aux oreilles, en pleine canicule. La peur au ventre de « crever mes eaux » en public, l’obsession du talon lisse et le millionnième livre de mots croisés. Et Mammouth, tanné d’être confiné au domicile avec une primipare sur le bord de la folie. Rien à faire. Une attente interminable que « miss mew » daigne quitter son nid douillet.
Assise dans la véranda, je revois Mammouth sur la terrasse, les yeux embués de l’ennui de ses enfants. J’ai soudainement réalisé, après avoir joué à la perfection mon rôle de baleine échouée pendant 2 semaines, qu’il était plus que temps que je fasse l’effort de passer par dessus ma peur. Ce soir là, nous sommes allé manger du thaï. Comme disent les zanglais, the rest is history…
Six ans plus tard, je mesure le chemin parcouru. Ce soir, c’est en famille élargie que nous fêterons merveilleuse merveille. Ce soir-là, au resto thaï, je ne savais pas ce qui m’attendais. Maintenant je sais. Enfin je pense. Et je ne regrette rien. Rien de rien.