Bien sûr, comme la majorité des gens, je suis choquée par la tragédie de Lac-Mégantic. Choquée comme dans sous le choc, et choquée comme en colère. L’horreur en plein milieu d’un petit paradis, l’horreur sans nom. L’inimaginable.
À travers, une mairesse qui se tient droite, digne et compatissante. Une première ministre qui fait preuve de compassion. Un premier ministre un peu froid – dans la nature de la bête, faut croire, mais qui a fait ce qu’il fallait faire, puis tout le reste du défilé des politiciens, tous partis confondus.
Dans une autre vie, j’ai été attachée de presse. J’ai eu à vivre quelques événements, de moindre ampleur j’en conviens, mais qui ont monopolisé les médias. Dieu merci, c’était avant l’avénement des réseaux sociaux.
Dieu merci, parce que je ne voudrais pas, pour tout l’or du monde, avoir à gérer une tragédie comme celle du Lac-Mégantic avec les gérants d’estrade qui pullulent sur FB et sur Twitter.
La moindre déclaration, le moindre mot est dépecé, disséqué, analysé, dans l’instant, sans le moindre recul. Parfois, parce que c’est signé du @jesuisjournalistedansungrandjournal, ça devient parole d’évangile. Par conséquent, les politiciens et leur entourage n’ont plus droit à l’erreur. Eux aussi travaillent dans l’urgence et avec un micro constamment sous le nez. Il n’est pas ici question de les excuser, mais d’expliquer que parfois, le contexte dans lequel tout le monde travail n’est pas propice à donner la meilleure et la plus solide information.
Pourquoi ce papier? Je lisais hier un commentaire sur FB, traitant le ministre québécois de l’environnement de « Big Fail » pour avoir dit dimanche que les impacts sur l’environnement seraient minimes. J’ai écrit un premier commentaire, lapidaire, sur l’infaillibilté des gérants d’estrade, lui demandant si lui, il n’avait jamais commis d’erreur dans le feu de l’action. Puis, je me suis dit que je respirerais par le nez et que je ne tomberais pas dans le piège.
Mais ça m’a fait réfléchir sur ce qu’on demande à nos politiciens. Et sur le fait que derrière nos écrans, c’est facile de juger. Trop facile. À tous les gérants d’estrade, le temps viendra de juger et de commenter le travail et les déclarations des uns et des autres. Pour l’instant, au moment où on vient de nommer la première victime, l’heure est à se retrousser les manches et à se taire. Avec à la carte une pensée pour ceux qui, une fois les caméras parties et le défilé terminé, vivront avec une cicatrice sur le coeur et dans leur ville.
Oui, c’est vrai que l’heure est à se taire. En même temps, je pense que les caméras et le défilé aident à passer à travers les premières heures. Même si on se sent bien seul ensuite, quand tout est fini.
Joan, tu as raison. Mais mon point est de dire que pour les gens confortablement assis derrière l’écran de l’ordinateur, juger et condamner les moindres propos des politiciens, c’est jouer aux gérants d’estrade sans connaître tous les détails de l’arrière scène.