Vous me connaissez, je ne parle jamais politique. Ou si peu. Et c’est pas parce qu’on est en 2012 que je vais déroger de cette règle. Par conséquent, je ne commenterai pas les commentaires d’un père blessé à mort, mais qui oeuvre dans le public.
Ce qui me trouble, dans cette histoire, ce ne sont pas ses remarques. Chacun a droit à ses opinions. Et je me garde le droit d’être d’accord ou non. Je peux même comprendre: si quelqu’un s’attaquait à merveilleuse merveille, mon premier réflexe serait de vouloir lui faire autant de mal qu’il lui en a fait. Physiquement mal, je veux dire. Dans le genre arracher les yeux, arracher les couilles, dépecer. Bon je sais, j’ai pas l’air d’être violente et au fond, je ne le suis pas. Mais je peux comprendre que mise devant la situation d’être dépouillé des êtres qu’on aime le plus au monde, le monstre en soi prend toute la place.
Non, ce qui me trouble depuis hier, ce sont les commentaires que j’entends autour de moi. Commençons par un aveu: malgré le paragraphe précédent, je suis contre la peine de mort. Profondément contre. Je ne crois pas à la loi du talion. Outre une satisfaction immédiate, il me semble que le fait d’emprisonner à vie est beaucoup plus rough que de mourir au bout d’une corde. Savoir que plus jamais on n’aura la liberté de ses actes et de ses mouvements, ça me semble encore plus terrifiant que de mourir.
Et puis, la peine de mort me semble être un symbole d’une société barbare, et malgré la tendance droite-drette-droitiste que prennent parfois le Québec et le Canada, je ne considère pas vivre dans un pays de cowboys. Enfin, c’est ce que je pensais.
J’ai été estomaquée par les remarques entendues sur le sujet aujourd’hui. Des gens que je côtoie tous les jours, que je considère, m’ont servi des énormités. Dans le genre:
- Sont traités comme des rois en prison, pis on paye pour ça.
- Ben oui ça se pourrait une erreur judiciaire, mais on fait pas d’omelettes sans casser d’oeufs.
- Tsé, y méritent juste ça ces crottés là.
- Il est temps qu’un gouvernement mette ses culottes, chu tanné de voir que mes taxes servent à ça. Moi, les Shaffira, j’enverrais ça se faire lapider dans leur pays.
Mais la meilleure, celle qui m’a touchée en plein front, c’est « on sait ben, toi, t’excusais Turcotte! Dans le fond, t’es une naïve de gauche, qui pense encore que tout le monde est beau, tout le monde il est gentil ».
Ma chum Sophie m’avait bien fait rire en me disant qu’elle est une hippie de garde-robe. Serais-je donc une Mère Térèsa qui refuse de sortir du placard?J’avais vu les chiffres d’un sondage qui indiquait que 69% des Québecois sont pour la peine de mort. Mais j’avais pas enregistré l’ampleur, je pense. Pour moi, ça fait partie des contradictions qui nous habitent comme peuple: on vote NPD en masse, mais on est pour la peine de mort. On fait pas dans la nuance. Plus du tout.
Non, je ne crois pas que tout le monde est beau, tout le monde il est gentil. Il est plein de cons, d’abrutis, de méchants tawins et de dangereux malades. Il est pas tout noir, ni tout blanc. Mais qu’on en soit à utiliser des arguments économiques dans un débat profondément moral, ça me chavire. En fait, c’est pire: on ne débat pas, on répète comme des perroquets des arguments gros comme des troncs d’arbre, sans même se demander s’ils tiennent la route.
Laissez-moi mes illusions: je ne veux pas vivre dans une société prête à prendre le risque d’une erreur judiciaire, parce qu’on ne fait pas d’omelettes sans casser d’oeufs. J’ai pas envie de vivre dans une société qui pense qu’on va régler des problèmes de criminalité – d’ailleurs, à part les cas sensationnels, je ne crois pas qu’on vive dans un monde hyper criminalisé! – en mettant à mort les coupables.
Ce matin, au déjeuner, j’ai eu une conversation avec merveilleuse merveille, qui voulait comprendre l’affaire Shaffia. On a parlé des talibans, de sociétés ou les femmes n’ont pas leur mot à dire, du père qui décide qui sera ton amoureux. Elle m’a dit qu’elle ne supporterait pas ça et a conclu en disant qu’on était chanceux de vivre ici, dans une société tolérante. Merveilleuse merveille, j’aimerais ça partager ton optimisme. Je suis de moins en moins sûre qu’on vit dans une société tolérante. Mais ici, dans ta maison, dans ta famille, ça reste une valeur fondamentale. T’en fais pas.
Sais-tu pourquoi je suis contre la peine de mort chère MJ, c’est que l’humain est grandement imparfait, plein de failles et de vieilles blessures, et ça c’est vrai du criminel et de celui qui le juge. Si l’humain avait la capacité de juger -vraiment-, de savoir reconnaitre le tueur en série fou et dangereux, de la personne qui a fait une erreur et ne re-pèchera pas, je serai pour la peine de mort, dans certains rares cas, (comme pour le fou qui a dépecé des prostituées à Vancouver et les a passés dans un hachoir à viande), mais jamais au grand jamais je n’accepterai qu’on laisse entre les mains des humains ce pouvoir, parce que n’importe quel humain avec juste un ti-peu trop de pouvoir peut devenir fou, et le pouvoir de vie et de mort, c’est trop pour la plupart des humains.
En espérant, oui que notre société demeure tolérante, pour ta MM, ma Grande et mon Fiston et qu’ils soient protégés des fous qui se promènent dans la rue ou qui pourraient décider du sort de la société dans laquelle ils vivront.
Juste une petite note pour dire que j’aime beaucoup te lire. Je viens d’acheter une maison au Québec et j’irai vivre dans la belle province pour la première fois cet automne. (Qui prend mari, prend pays…?)
J’aime lire tes réflexions sur le Québec et ses habitants. Elles m’aide à connaître cette nouvelle culture dans laquelle je baigne, certes, depuis quelques années, mais que j’adopterai pour la mienne bientôt.
Merci Kim. J’espère que mes observations ne te feront pas peur! On est un peuple chaleureux, plein de contradictions, mais avec un bon fond, comme on dit ici 🙂
Et bienvenue sur mon patio. Tu verras, à l’été, on y est très bien avec un petit rosé.