C’était une belle cérémonie. Simple, empreinte de chaleur humaine, la plus grande église de la ville était remplie à craquer. Son fils et son petit-fils lui ont rendu un hommage plein d’amour, mais réaliste. J’ai toujours eu un problème majeur avec les gens qu’on « béatifie » une fois mort. Oyé avait son caractère, on pouvait argumenter virilement, et ça n’enlève en rien le fait qu’il était un homme bon. Pas un saint. Un homme bon, généreux mais cassant, comme plusieurs hommes de sa génération. Mais un homme qui a trouvé la force de s’ouvrir pendant sa maladie et de dire les vraies choses.
J’y ai revu des anciens voisins, des membres de ma famille que je ne croise pas souvent. C’est dommage qu’on ne se crée pas plus d’occasions de se voir dans des circonstances moins tristes qu’un décès. J’y ai aussi rencontré des gens dont j’avais entendu parler, et qui sont tout à fait sympatiques. Comme il l’avait souhaité, le repas qui a suivi a été agréable: les gens bien sûr ont pleuré, mais ils se sont aussi rappelé des souvenirs heureux de ce joueur de tours et de ce raconteur d’histoires à dormir debout. Et c’est très bien ainsi. La vie doit continuer.
J’ai expliqué à merveille que dorénavant, Oyé serait dans son coeur et qu’à chaque fois qu’elle s’ennuierait de lui, elle pourrait regarder la rose qui m’a été remise hier. Même si elle n’est pas de la famille, ses enfants avaient eu la gentillesse de mettre une rose au nom de ma fille avec celles de ses petits-enfants.
Ce matin, de retour à la maison, la routine a repris. En revenant de faire les courses avec merveilleuse merveille j’ai glissé un CD dans la voiture et j’ai pitonné au hasard. Dès les premières mesures, j’ai eu la chair de poule et les larmes se sont mises à couler. J’ai nettoyé mon chagrin sur ces mots:
Sous le vent
(…)
Et si tu crois que c’est fini
Jamais
C’est juste une pause, un répit
Après les dangers
Et si tu crois que je t’oublie
Écoute
Ouvre ton corps aux vents de la nuit
Ferme les yeux
Et
Fais comme si j’avais pris la mer
J’ai sorti la grand’voile
Et j’ai glissé sous le vent
Fais comme si je quittais la terre
J’ai trouvé mon étoile
Je l’ai suivie un instant
Sous le vent
Paroles et Musique: Jacques Veneruso
Oyé a toujours eu un bateau, et hier, après la cérémonie, un grand vent a balayé les nuages. C’était sa façon de nous dire au revoir…
Je crois beaucoup à ces signes, surtout après la cérémonie. Il y en a eu tellement de maman. Elle nous en donne encore, pour nous préparer au grand départ de papa.
C’est une belle chanson…
C’est très émouvant… il se dégage une telle sérénité de ce moment…
Au moment où je t’écris,l est 22h30… je suis assise, avec juste une bougie qui vacille derrière moi, et la porte-fenêtre qui donne sur la terrasse entr’ouverte…
Au moment où je t’imaginais roulant dans ta voiture, le doigt hasardeux sur l’auto-radio, un souffle est venu me caresser les épaules…
« sous le vent » est une très belle chanson…
Desormais, je l’écouterai en pensant à toi…
C’est rassurant de lire ces mots. Comment va ta maman?