Les chroniques du patio Là où fleurent bon la résine de synthèse et le p'tit rosé estival

1 septembre 2008

Au revoir, tante Jeanne

Filed under: tranches de vie — Marie-Jose @ 09:27

À 89 ans bien sonnés, tante Jeanne a décidé cette nuit d’aller rejoindre son créateur. Femme d’église qui s’est dévouée pour sa mère, ses frères et soeurs et ses neveux et nièces, tante Jeanne était un peu le ciment de notre large famille. Fière sans aucune pudeur des moindres réalisations de chacun d’entre nous, nous étions pour elle les « plus meilleurs au monde ». Rien de moins.

Avec elle, c’est aussi la maison familiale qui disparaîtra. Cette maison qui nous a tous vu, sans exception je crois, ouvrir la porte du frigo à la recherche de l’inimitable fudge de tante Jeanne et de son fidèle compagnon, le sucre à la crème. Refuge pour plusieurs d’entre nous, je soupçonne, pendant nos crises d’adolescentes incomprises, elle savait, entre deux parties de canasta, dédramatiser. Tout.

Sur le tard, tante Jeanne s’était fait un amoureux. Un bon et beau monsieur, gentil, dévoué, qui l’a accompagné partout. Un vieux ratoureux, bon des « créatures », qui se gardait toujours une « poire pour la soif ». Mais Jeanne était loin d’être une poire… Je me suis longtemps demandé comment s’était, de découvrir la et sa sexualité à 74 ans. Évidemment, je n’ai pas posé la question, mais je suis convaincue qu’elle y aurait répondu, avec son petit sourire en coin.

Je suis allée lui rendre une dernière visite, il y a quelques semaines, avec Merveilleuse merveille. Malade, tellement petite dans l’immensité de son grand lit d’hôpital, sourde comme un pot et privée de ses appareils, elle nous a reconnues, même si elle commençait à perdre un peu de sa lucidité. Nous avons fait le tour des photos de famille – pour elle, même si les grands n’avaient pas le sang familial, ils faisaient tout autant partie de son album de famille, et malheur à qui aurait osé dire le contraire. C’était ça, tante Jeanne. 5 pieds d’amour inconditionnel, de mauvaise foi quand il s’agissait de trouver des défauts à l’un d’entre nous, et de courage indomptable.

Au revoir tante Jeanne. Sois sage, là-haut: tu pourras pas y faire régner ta volonté comme tu le veux!

3 Comments »

  1. Très touchant ton billet, Marie-José…. tu sais tellement bien parler de ceux qui te quittent. En ne soulignant que le bonheur qu’ils t’ont apporté, mettant de côté ta douleur. J’ai peur de ne pas savoir faire ça.
    Ma mamie s’appelle Jeanne aussi. Elle a 92 ans et elle est hospitalisée depuis une semaine. Ma maman vient de m’appeler, la gorge nouée. Ma mamie ne reconnait plus personne. Parle de chauve souris au plafond. De ses frères et soeurs qui sont venus la voir dans ses rêves. Elle a demandé si j’avais bien manger… moi, Véro. alors qu’elle n’a pas reconnu sa propre fille.
    J’espère que ma Jeanne va attendre encore un peu pour rejoindre la tienne… à qui je pense ce soir…
    Je te fais de gros bisous…
    Et bonne rentrée à Merveilleuse Merveille…

    Commentaire by La Véro — 1 septembre 2008 @ 15:05

  2. J’avais écrit un joli mot (je crois), sur le deuil, les Jeanne et blabla. Et, manifestement, il n’a pas été reçu (ou accepté???).

    Cela dit, mes sympathies pour la Jeanne. J’imagine bien ta peine.

    xx

    Commentaire by djo — 7 septembre 2008 @ 19:58

  3. @Véro: ce que je sais, c’est que les mots apaisent, tout comme le sentiment de boucler la boucle. Ce serait très différent si quelqu’un que j’aime mourrait subitement. Je serais bien incapable d’en parler avec autant de sérénité…
    @Djo: hum… j’ai lu les 1272 messages attrapés par Askimet, et ton long message n’y était pas! Encore un qui s’est perdu dans le cybermystère du cyberespace… Merci pour les bons mots.

    Commentaire by MJ — 8 septembre 2008 @ 18:44

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