Aller retour à Québec la semaine dernière. Pour une session de travail avec des collègues. Dans la tempête, la vraie et celle que nous traverserons cette année.
Jeudi soir, je suis allée souper avec une copine pas vue depuis longtemps, qui m’a fait découvrir le secret le mieux gardé de Québec en termes de restaurant: la « Cohue ». J’y ai mangé un des meilleurs tartares de ma vie, meilleur que celui de l’Express, c’est pas peu dire! Et le service? Courtois, impeccable. Vraiment, j’ai hâte d’y amener le Mammouth.
Mais ça aurait tout aussi bien pu être une poutine Ashton. Le vrai plaisir, outre celui de la table, était bien plus dans la conversation avec Esther. Ça faisait une éternité que nous n’avions pas échangé, en plus de 140 caractères. La maternité m’accapare moins – il était temps, direz-vous, Merveilleuse merveille a 9 ans!, je redécouvre le plaisir de ces conversations de filles, à la fois tellement futiles et profondes. Et j’en aurai bien besoin, cette année, de ces conversations.
Tempête donc, dans mon milieu de travail. Bien sûr, personne ne pleurera le sort de fonctionnaires, déjà grassement payés pour ne rien faire dans l’esprit de bien des gens. Il est vrai que comparé aux travailleurs de White Birch, à ceux de Mabe et à combien d’autres, notre sort est enviable, les conventions collectives garantissant quand même des conditions de fin d’emploi qui sont plus qu’acceptables. N’empêche. Perdre son emploi, ce n’est pas jojo. Pour personne. Et derrière tous ceux qui risquent de passer à la moulinette, il y aura des drames humains: certains ont des conjoints malades, d’autres de jeunes enfants, ou alors viennent de s’acheter une résidence. Et comme gestionnaire, il faudra gérer la décroissance, en gardant le cap sur l’objectif, tout en s’assurant que les gens seront traités humainement, respectueusement.
Et moi? Moi aussi, je pourrais y passer. Il est vrai que pendant 20 ans, je n’ai eu aucune permanence, aucune sécurité d’emploi. Quand tu travailles en politique, tu sais à quelle heure tu entres au bureau le matin, mais tu ignores à quelle heure tu en sortiras et surtout, si tes services seront requis le lendemain. J’ai appris à vivre avec cette incertitude, qui n’est jamais devenue une angoisse. Il y a donc une partie de moi qui se dit qu’on traversera le pont quand on arrivera à la rivière et que y’a un Bon Dieu pour les Marie-José. L’autre fait « shit! » – j’ai presque 50 ans, une jeune famille et des obligations plates comme une hypothèque et un prêt auto. Me semble que j’aurais aimé ça, un bout tranquille.
Ai-je envie de tout recommencer? De repartir à zéro dans une autre sphère que je ne connais pas? En fait, je vaux quoi sur le marché privé? Je n’en ai aucune idée. Ma seule certitude, c’est que j’ai Mammouth derrière moi. Qui, peu importe ma décision, sera solidaire et aidant. Mais je demeure optimiste: j’ai toujours su tirer mon épingle du jeu, et cette fois-ci ne sera pas différente. J’ai toujours pensé, et dit, que lorsqu’une porte se ferme, c’est qu’une fenêtre s’ouvre, souvent sur un paysage encore plus fabuleux. Alors j’ouvre mes fenêtres, je me mets en état de disponibilité et je fais confiance à la vie. À ma vie.
Tempête itou au plan médiatique. Le verdict vient de tomber sur le procès Shafia. Je suis heureuse de vivre dans un pays ou ce genre de crime n’est pas accepté et acceptable. Mais je vois tout de suite les comparaisons oiseuses qui se feront entre ce verdict et celui de l’affaire Turcotte. Dans un cas comme dans l’autre, le verdict ne ramènera pas les victimes. Il est là, le malheur. Pas dans le bruit autour.
Je fais le plein, ce weekend. De repos, d’amour et de tranquillité. Nous retournerons au patin, Merveilleuse merveille s’étant découvert une passion pour ce sport et ma banlieue mettant à la disposition des familles des heures de glace gratuites. Ne serait-ce que pour ça, les 4 heures de transport en commun quotidiennes me semblent moins lourdes.
Et quand nous reviendrons, le chili amoureusement concocté par le Mammouth sera prêt, le vin sera bon et la soirée sera tranquille. Demain, la tempête reprendra. Demain. D’ici là, c’est le calme. Et c’est très bien ainsi.