Vous me connaissez, je ne parle jamais politique. Ou si peu. Mais ce soir, je ne comprends plus, j’ai besoin de m’expliquer ce qui se passe.
Jusqu’à cette semaine, j’aurais fait partie des « sondés » qui se rangeaient du côté du gouvernement dans le dossier de la hausse. Pas totalement en accord avec la manière, mais tout à fait sur le principe. Cette hausse, elle est plus que due. Et si vous voulez mon avis (et même si vous ne le voulez pas!), le même principe devrait s’appliquer aux garderies. On ne peut continuer à revendiquer le beurre, l’argent du beurre, la vache, la crémière et le cul de la crémière.
D’être pour la hausse ne fait pas de moi une méchante réac de droite. Ne m’empêche pas de penser que le problème de sous-financement des universités n’est pas la responsabilité des étudiants. Que la gestion de ces dernières doit être revue, de fond en comble, pour dégager des marges de manoeuvre qui permettront, justement, d’améliorer la qualité de l’enseignement et de la recherche, et ultimement, de renverser la portion prêt vers des bourses dans le fameux régime du même nom.
Ça ne m’empêche pas non plus de penser que le gouvernement aurait pu gérer autrement, même si j’admets que le discours de la CLASSE m’irrite profondément. Parler de guerre civile, il y a 4 semaines, était un peu disproportionné. Mais bon, je me suis rappelé qu’un jour, il y a longtemps, j’ai aussi eu 20 ans, j’ai fait la grève, et j’ai probablement tenu des propos tout aussi irritants.
Je vois, dans ces jeunes qui se battent pour un idéal, mes enfants. Et de voir des étudiants en sang m’est insupportable. Je ne veux pas tomber dans l’angélisme, ni dans le sensationnalisme. Mais ces images parlent. Fort.
Depuis le début de la semaine, je ne comprends plus. D’ou vient ce dérapage? Je sais, vous allez me dire que l’intransigeance de madame Beauchamps y fait pour beaucoup. Que le mépris, réel ou ressenti, du gouvernement à l’égard des étudiants ne pouvaient mener qu’à ce qu’on voit depuis 2 jours: des saccages, des policiers qui outrepassent leur mandat, des gestes disgracieux, de la violence.
Je ne comprends pas. Au-delà de ce qu’on peut penser de la hausse, le débat n’est plus là. Le débat s’est déplacé sur ce qui nous a mené là. Je travaille au centre-ville, et les images de ma ville, pleine de policiers anti-manifestants, de casseurs professionnels, jour après jour, me hantent .Et le débat est maintenant sur les cicatrices que cette crise laissera. Quand la poussière sera retombée, il faudra faire le départage des responsabilités. Maintenant, ce n’est pas le temps.
Et, comme plusieurs, je condamne les propos du premier ministre. J’aurais aimé voir Jean Charest s’élever au-dessus du débat. Ce n’est pas désavouer sa ministre que de se poser en homme d’état, qui voit les choses dégénérer et qui a l’autorité morale de mettre un terme à ce gâchis.
Je ne sais pas quoi répondre à Merveilleuse merveille quand elle me demande pourquoi. Je ne sais plus si je veux participer, ce dimanche, au rassemblement du Jour de la Terre. Je l’avoue, j’ai peur. Peur d’être dans une foule qui ne pourra plus se contrôler. Peur que ma volonté de démontrer à ma fille qu’on peut, collectivement, se tenir debout et dire qu’on veut leur léguer une terre en bonne santé, soit contrecarrée par des images de violence.
Je ne comprends pas. J’ai pas envie de blâmer, mais j’ai besoin de comprendre.